Transformation numérique : comment ne pas manquer la phase qui s’ouvre dans le travail ?

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Aurélie Dudézert, Institut Mines-Télécom Business School et Florence Laval, IAE de Poitiers

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[dropcap]A[/dropcap]près un confinement qui a servi de révélateur de la maturité des entreprises quant à leur transformation digitale, le déconfinement a ouvert une nouvelle phase qui se caractérise par la volonté d’une reprise d’activité « normale » rendue de fait impossible à cause des contraintes sanitaires évolutives.

Certaines organisations sont donc tentées de se servir du contexte sanitaire comme prétexte pour reprendre la main sur des échanges et ajustements informels impossibles à contrôler en mode de travail distanciel (pointage des présents sur site vs présents en distanciel ; identification de qui travaille avec qui, à quel moment, etc.).

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L’agilité organisationnelle revendiquée par l’objectif de transformation digitale et mise en œuvre dans les équipes lors de la période du confinement est alors battue en brèche dans des tentatives de standardisation de l’acte de travail et du retour à des processus uniformes pour l’ensemble de l’organisation.

Le port du masque devient également objet de tensions. Outre l’inconfort de l’objet, la dissimulation du visage après une période souvent en distanciel où la perception des émotions de l’autre a été difficile, complexifie les relations. Il faut apprendre à lire les émotions autrement comme à dialoguer autrement avec l’autre.

Les difficultés se multiplient en outre avec l’incertitude sur les évolutions des contraintes sanitaires. Des modes d’organisation du travail très adaptatifs doivent être mis en place. Les phases de fermetures de sites succèdent à des phases de travail en mode hybride avec des salariés présents sur site à tour de rôle pour respecter les contraintes sanitaires.

Penser la transformation

Alors qu’ils avaient appris à travailler ensemble à distance, il s’agit donc pour les salariés comme pour les managers de réapprendre à travailler ensemble constamment.

Face à cette situation trois pistes, que nous détaillons dans le livre collectif « L’impact de la crise sur le management » (Éditions EMS) paraissent pertinentes pour passer le cap de ce deuxième épisode de la crise et poursuivre la transformation digitale amorcée des modes de travail.

La première est de travailler avec les équipes sur les tensions et crispations émergentes en les voyant non pas comme des symptômes de l’incapacité/l’incompétence des individus à faire face à la situation mais comme des leviers pour construire les modes de coordination du travail adéquats.

Si le port du masque est sujet de tensions par exemple, réunir les équipes pour dialoguer sur ce qui génère la tension peut permettre de créer une nouvelle modalité de travail plus efficace et plus adaptée au nouvel environnement numérique. Ceci implique pour le manager de prendre au sérieux et de reconnaître l’expérience et le vécu des collaborateurs pour ce qu’ils révèlent comme attentes, comme créativité, voire comme rejet de l’organisation et de son projet.

Développer un management réflexif, qui prend du recul sur les modes de travail mis en œuvre dans la phase actuelle d’adaptation, constitue la deuxième piste. Il apparaît assez nettement aujourd’hui que la pratique de travail tend à l’hybridation entre présentiel/distanciel et synchrone/asynchrone.

Plutôt que de voir les changements successifs des règles sanitaires comme des contraintes empêchant l’activité et la poursuite sereine de la transformation digitale en cours, les organisations bénéficieraient à profiter de ces adaptations régulières pour tirer des leçons sur les avantages et les inconvénients de cette hybridation en situation.

Cette prise de recul permettrait par exemple de caractériser quelles activités spécifiques à chaque équipe sont incontestablement plus productives en présentiel ou en distanciel ou d’identifier comment manager des équipes à la fois en distanciel et en présentiel.

Enfin, troisième piste, « encourager l’intelligence digitale », c’est-à-dire à définir collectivement avec l’équipe les besoins et les usages des technologies digitales en fonction des modes de travail. Il n’est pas forcément nécessaire par exemple de faire monter en compétences ses collaborateurs sur la maîtrise d’un outil de travail collaboratif complet si on veut simplement leur permettre de travailler entre eux via des webconférences.

Sursolliciter l’énergie des collaborateurs dans une période aussi instable et inconfortable est un risque supplémentaire de mise à mal du projet de transformation digitale. Revenir à l’essentiel de l’usage des technologies digitales pour la réalisation de la tâche paraît beaucoup plus utile et efficace.The Conversation

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Aurélie Dudézert, Full Professor, IMT BS, Institut Mines-Télécom Business School et Florence Laval, Maître de conférences, IAE de Poitiers

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

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