Antoine Fécant, lauréat du Prix Espoir IMT-Académie des Sciences 2021

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Chercheur en nouveaux matériaux pour l’énergie à IFP Énergies nouvelles, Antoine Fécant a travaillé sur de nombreux projets portant sur la production de carburants solaires, biosourcés ou sur le raffinage du pétrole. Ses travaux s’inscrivent dans la transition énergétique et sont cette année récompensés par le Prix Espoir IMT-Académie des sciences.

« L’énergie est centrale dans nos modes de vie, annonce Antoine Fécant, chercheur en nouveaux matériaux pour l’énergie à IFP Énergies nouvelles. Plus jeune, je voulais travailler dans ce domaine et mon appétence pour la chimie m’a convaincu de m’orienter vers cette branche. J’ai toujours été attiré par la beauté de la Science, et je trouve une satisfaction encore plus grande à orienter mes travaux de manière à ce qu’ils trouvent une utilité concrète pour nos sociétés. » Depuis 2004, ses recherches ont principalement porté sur des matériaux accélérant les processus chimiques : les catalyseurs.

Les premiers travaux d’Antoine Fécant portaient sur une classe de catalyseurs nommée zéolithe. Les zéolithes sont des matériaux constitués principalement de silice, d’aluminium et d’oxygène. Elles se trouvent à l’état naturel, mais il est également possible et souvent préférable de les synthétiser. Ces objets contiennent des réseaux de porosité qui peuvent être utilisés pour limiter les quantités de sous-produits générées. Les zéolithes sont utiles pour optimiser les rendements d’une réaction chimique, la consommation énergétique et ainsi limiter les émissions de CO2 et la production de déchets.

La thèse d’Antoine Fécant réalisée entre 2004 et 2007 avait pour idée de développer une méthodologie singulière afin de générer des nouvelles zéolithes. Dans ce cadre, il a utilisé une approche multidisciplinaire et fait appel à un couplage entre la chimie combinatoire et la modélisation moléculaire pour « identifier des voies de synthèse de zéolithes en fonction de la structure poreuse recherchée, déclare-t-il. Cette méthodologie nous a permis de définir des critères de rationalisation permettant d’accélérer très significativement les travaux de recherche et de développement dans ce domaine », poursuit Antoine Fécant.

Si cette approche était tout à fait innovante il y a quinze ans et lui a permis d’être récompensé à ce titre du prix de thèse « Yves Chauvin » en 2008, elle s’est aujourd’hui répandue dans les domaines de la chimie, de la biochimie et de la génomique, signe du caractère précurseur de l’approche du chercheur.

Améliorer la production d’énergie solaire et recycler le CO2

Après avoir reçu son doctorat, Antoine Fécant obtient le poste d’ingénieur de recherche à IFP Énergies nouvelles. Toujours dans le but de proposer des solutions techniques visant à contenir les émissions de gaz à effet de serre, le chercheur débute en 2011 un projet visant à développer des matériaux et des procédés permettant le recyclage du CO2 par l’utilisation de l’énergie solaire. Ce travail lui a valu de recevoir en 2012 le prix jeune chercheur de la ville de Lyon. Cette initiative découle du principe de l’intermittence de l’énergie solaire. Elle se base sur l’idée qu’une étape directe de conversion/stockage de ce flux énergétique en source d’énergie facilement utilisable permettrait une meilleure exploitation de celui-ci.

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« Pour pallier cet inconvénient, nous avons projeté de trouver un moyen de stocker l’énergie solaire sous forme de carburant, déclare Antoine Fécant. Cela permettrait de constituer des réserves énergétiques dans une forme déjà connue et utilisable pour divers usages courants tels que le chauffage, les transports ou dans les secteurs de l’industrie et du transports », ajoute-t-il. Pour arriver à cette fin, le chercheur se base sur le principe de la photosynthèse naturelle : capter de l’énergie lumineuse pour convertir le CO2 et l’eau en molécules carbonées plus complexes et à valeur énergétique.

Afin de transformer artificiellement l’énergie solaire en énergie chimique, Antoine Fécant et son équipe, en collaboration avec des acteurs académiques, ont développé plusieurs familles de matériaux spécifiques. Ces derniers, nommés photo-catalyseurs, ont été optimisé par les chercheurs au niveau de leurs natures et de leurs structures à l’échelle nanométrique. Parmi les composés développés figurent une famille de matériaux monolithiques faits de silice et de dioxyde de titane, permettant une meilleures utilisation des photons incidents par un effet « nano-miroir » ; d’autres familles de matériaux à architecture composite permettant de reproduire le processus énergétique des étapes multiples et complexes et la photosynthèse naturelle ; enfin, de toutes nouvelles structures cristallisées permettant une mobilité accrue des charges électroniques nécessaires à la conversion du CO2.

Selon Antoine Fécant « ces matériaux sont intéressants mais ne permettent à ce jour de surmonter qu’un seul obstacle à la fois, or il en existe plusieurs. Il faut maintenant travailler à une synergie de ces nouveaux systèmes catalytiques pour réaliser la photo-conversion du CO2 de manière efficace et atteindre un seuil de rendement énergétique d’au moins 10 % pour lequel on estime que ce moyen de production d’énergie soit viable ». Le chercheur estime qu’il faudra attendre encore quelques décennies pour que ce procédé puisse être déployé à l’échelle industrielle.

Catalyser la production des carburants biosourcés et fossiles

Antoine Fécant a par ailleurs mené des études pour réduire l’impact environnemental de l’utilisation des carburants conventionnels et de leurs procédés de fabrication. Dans ce cadre, il a conçu des catalyseurs plus performants permettant de contribuer à l’amélioration de l’efficacité énergétique des procédés et ainsi de limiter les émissions de CO2 associées. Le chercheur a également participé à la découverte de catalyseurs permettant d’augmenter les rendements de la Synthèse Fischer-Tropsch, une étape clé dans la transformation de la biomasse lignocellulosique pour la production de bio-carburants avancés. Ces derniers pourraient d’ailleurs contribuer à limiter l’empreinte carbone du secteur de l’aviation.

En recevant le Prix Espoir IMT Académie des sciences, Antoine Fécant espère mettre en lumière les recherches sur les carburants solaires et souhaiterait « que cette voie soit davantage mise en valeur ». Ces carburants pourraient en effet constituer une piste prometteuse pour mieux valoriser l’énergie solaire par la maîtrise de l’intermittence et du stockage. « Les travaux sur ces thématiques ont besoin d’être soutenus sur le long terme afin de contribuer aux changements de paradigme nécessaires de liés à nos consommations énergétiques », conclut le lauréat.

Rémy Fauvel

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De l’énergie aux pneumatiques

Au cours de sa carrière, Antoine Fécant a également participé à un travail collaboratif sur la production de composés biosourcés. L’objectif de ce projet était de concevoir un procédé de fabrication du butadiène, une molécule de base dans la composition des pneumatiques, à partir de ressources végétales non-alimentaires. Si elle est couramment produite à partir d’énergies fossiles, les chercheurs ont trouvé un moyen de la générer à partir de composés lignocellulosiques. Les équipes du projet sont parvenues à mettre au point un procédé et les catalyseurs associés permettant de transformer par condensation de l’éthanol en butadiène. Ce projet qui a duré une dizaine d’années est aujourd’hui en phase de finalisation.

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