Le MP4 au service du streaming

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Si aujourd’hui les services de streaming font partie de nos usages courants, c’est avant tout grâce au MP4. Ce standard informatique permet de lire des vidéos, notamment en ligne et sur divers appareils. Jean-Claude Dufourd et Jean Le Feuvre, chercheurs en informatique à Télécom Paris, ont été récompensés par l’Académie des Emmy Awards pour leurs travaux concernant entre autres ce format informatique.

En 2021 le groupe de travail en informatique File Format du comité MPEG a reçu un Emmy Award pour avoir œuvré au développement du ISOBMFF. Derrière ce terme se cache un format informatique qui a notamment servi de base au développement du MP4, le célèbre standard de vidéo auquel nous avons tous été confrontés en enregistrant un fichier au format « .mp4 ».  « La décision d’Emmy d’attribuer une récompense au groupe File Format est justifiée : ce format de fichier a eu un grand impact sur le monde de la vidéo en créant tout un écosystème rassemblant des recherches très différentes » explique Jean-Claude Dufourd, chercheur en informatique à Télécom Paris et membre du groupe File Format.

Le MP4, qui permet d’encapsuler du son et notamment des vidéos, « est utilisé pour la diffusion media en direct ou à la demande, mais pas pour la diffusion en temps réel nécessaire au fonctionnement des jeux en streaming ou des visio-conférences » explique Jean Le Feuvre, chercheur en informatique à Télécom Paris et membre du groupe File Format. Ce format possède plusieurs caractéristiques qui ont participé à son succès. Parmi elles figurent la capacité à encapsuler de longues vidéos telles que des films tout en restant très compact.

Plus le volume du fichier est petit, plus il circule facilement sur les réseaux. Cette compacité du MP4 est donc un atout pour la diffusion de films et de séries en streaming.  Une autre explication du succès du MP4 réside dans son adaptabilité aux différents types d’appareils.  « Cette technologie peut être utilisée sur des supports très variés de la vie courante comme les téléphones, les ordinateurs et les télévisions » explique Jean-Claude Dufourd. Si le MP4 est lisible sur différentes machines, c’est parce que « le protocole de distribution de fichier HTTP a été réutilisé pour distribuer de la vidéo » indique le chercheur.

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Adapter la qualité de diffusion

Le protocole HTTP (Hypertext Transfer Protocol), très répandu dès les années 90, permet typiquement de générer les pages des sites internet. Les chercheurs ont modifié ce protocole pour qu’il puisse diffuser des fichiers vidéo en ligne. Leurs études ont conduit à l’élaboration du HTTP streaming puis d’une version améliorée intitulée DASH (Dynamic Adaptive Streaming over HTTP) : un protocole qui « découpe les informations du fichier MP4 en morceaux de quelques secondes chacun » déclare Jean Claude Dufourd. Les segments obtenus à l’issue du découpage sont récupérés successivement par le lecteur pour reconstituer le film ou l’épisode de la série en cours de visionnage.

Cette découpe permet d’adapter la lecture d’un fichier vidéo au débit d’une connexion. « Pour chaque plage temporelle, des encodages en qualités différentes sont fournis, le lecteur média étant chargé de décider quelle qualité est la meilleure au vu de ses conditions d’utilisation » explique Jean Le Feuvre. Typiquement, si le débit de la connexion d’un spectateur est faible, le lecteur de streaming va choisir le fichier vidéo avec le moins de données possible pour faciliter le trafic. Le lecteur va donc sélectionner la qualité de diffusion la moins bonne. Cette fonctionnalité permet de continuer la lecture d’un contenu sur une plateforme en minimisant les risques d’interruption.

Pour aboutir à cette capacité d’adaptation face aux différents scénario d’utilisation, des essais ont préalablement été conduits par des scientifiques et des industriels. « Des tests ont été menés pour déterminer le profil réseau d’un téléphone et d’un ordinateur » explique Jean-Claude Dufourd. « Les résultats ont montré que les profils étaient très différents en fonction de l’appareil et de la situation, de ce fait les contenus ne sont pas diffusés avec la même fluidité »ajoute-t-il.

Des intérêts économiques

« Aujourd’hui nous bénéficions d’une quinzaine d’années de raffinement de la technologie qui ont permis de rendre les algorithmes performants pour regarder des vidéos en streaming » déclare Jean-Claude Dufourd. Depuis le début du streaming, un des objectifs est de diffuser avec la meilleure qualité possible des vidéos tout en réduisant la latence de chargement et en sollicitant le moins possible les capacités du réseau.

L’enjeu est avant tout économique : plus les plateformes de streaming sollicitent les capacités d’un réseau pour diffuser leurs contenus, plus elles paient cher. Actuellement, des personnes étudient comment diminuer la facture internet du diffuseur. Une des solutions serait de faire circuler les fichiers vidéo avant tout entre les utilisateurs, donnant ainsi un système de diffusion moins centralisé. C’est ce que permettent les systèmes de partage de fichiers entre les usagers (réseaux P2P ou Pair-à-Pair). Cette alternative est aujourd’hui envisagée par les sociétés de streaming puisqu’elle permettrait de réduire les coûts liés à la diffusion de contenus.  

 

Rémy Fauvel

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